Intel inside, que dois-je en penser?
Voilà une question que pas mal de gens se posent depuis lundi soir, que ce soit chez les mac addict, chez les power-users comme une bonne partie des membres de macbidouille, chez les utilisateurs courants, mais aussi dans les entreprises, chez les développeurs, chez la concurrence :) ... C'est une question qui concerne tout le monde en somme.
Prenons un peu de recul et regardons devant nous! Que peut nous apporter Intel demain?
Pour la première fois, nous n'avons plus de souci sur le développement hardware de nos macs. En effet, Intel est un monstre qui, quoi qu'il arrive, avancera. S'il ne le fait pas, tout le monde stationne et attend la suite des évènements, y compris les véritables concurrents directs d'Apple que sont Dell, HP, Sony et dans une autre mesure Microsoft. C'est quelque chose de nouveau pour nous, mac users. Nous n'avons pas connu ça depuis bien longtemps... probablement depuis les premiers G3. Et je dois avouer que ça soulage, non seulement nous, mais aussi le staff Apple qui peut ainsi maintenant regarder devant et se consacrer à ce à quoi il excelle, le software.
Les chips Intel ne sont certes pas des exemples de bon développement hardware. L'architecture actuelle est vieillissante. Leurs puces comportent encore des registres 16bits pour DOS et on y voit débarquer des technologies telle NX faites pour "boucher" des problèmes de sécurité par buffer overflow, ce qui est complètement aberrant sur un processeur. Leur consommation, donc dissipation thermique, est aussi hors-norme sur les Pentium 4E. Mais il faut savoir que depuis l'arrivée de son nouveau CEO il y a 2 ans, Intel a pris un nouveau départ. L'architecture NetBurst utilisée dans la gamme "actuelle" de Pentium 4 pour desktop sera abandonnée au profit du Pentium M, descendant du Pentium 3 et qui fait des merveilles sur les portables. Celle-ci a déjà plus que fait ses preuves sur les portables PC. Voilà pourquoi Apple pourra fournir dès 2006 des portables et des Mac Mini équipés de cette technologie. Avec le centrino, l'autonomie grimpera en flèche par rapport aux Powerbook actuels. Du côté des desktops, le Pentium M pourrait arriver en masse d'ici 2006. Les roadmaps d'Intel annonceraient des quadri core pour 2007 en standard et des 32 cores pour les chips les plus évolués! Le 64bits fait aussi partie des prérogatives d'Intel. Apple attend ces chips avec impatience pour remplacer le PowerPC 970, et avec raison ! En face, IBM nous promettait 3GHz pour il y a plus d'une année, de même les G5 pour portables étaient soi-disant prévus pour 2004. Vous avez vu venir quelque chose ? Moi pas ! Un processeur dont il est impossible de baisser la consommation est un processeur mort, qui ne peut que stagner en fréquence. Intel nous l'a démontré avec son architecture NetBurst.
Il va falloir donc changer nos habitudes et commencer à fouiner sur les sites de nos confrères PCistes pour mettre à niveau nos connaissances sur les technologies qu'ils ont à nous apporter, et sur le futur de leurs (nos) processeurs.
Un seul souci toutefois de ce côté, les DRM. En effet, Intel les intègre désormais à ses puces. Apple va-t-il en profiter pour sécuriser son marché musical ? Ou au contraire, vont-ils s'y refuser?
Et pourquoi pas AMD me direz-vous? Figurez-vous que je poserais bien la question à Steve :). Pour ma part je ne peux qu'émettre quelques suggestions. Tout d'abord Apple a subi à deux reprises des lourds revers avec ses processeurs (G4 et G5). Il est peut-être plus sécurisant de se retrouver sous l'aile d'Intel, un géant qui sait tout faire, de la carte mère au CPU en passant par le PCI-Express, qu'avec AMD, qui est nettement plus petit et dont l'avenir reste à la place du second. Par ailleurs, AMD n'a pas vraiment de technologie satisfaisante au niveau des portables. Or c'est un marché très important pour Apple. Non seulement c'est un hit dans les ventes, mais en plus c'est ce qui véhicule le mieux l'image de la marque. Vous ne voyez pas des gens avec des Powerbooks et iBooks partout, dans le train, dans les bars et dans les écoles?
Quoi qu'il en soit, IBM vient de prendre une baffe, volontairement ou non, en perdant la firme "hype" qui mettait en avant ses puces. Eux préfèrent se tourner vers les consoles de jeux, comme nous le savons. Leur image en prend un mauvais coup, de même pour le PowerPC dont on peut désormais se demander quel est son avenir dans les serveurs moyen de gamme de cette firme. Bref, tant pis pour eux, ils font partie désormais du passé... proche du musée. Il est vrai que le PowerPC était un choix plus audacieux, plus élégant, plus intéressant que celui du géant Intel. Apple a voulu y croire et nous y avons cru, mais aujourd'hui, le PowerPC est mort, vive le PowerPC!
Comme vous l'aurez compris je pense que le choix d'Apple jusque-là est excellent. Intel nous offre soudain ce dont nous rêvions, un avenir matériel. Mais ceci implique une multitude de changements au niveau software. Notre OS roulant déjà sur x86, les librairies composant les fondements de Mac OS X y sont déjà fonctionnelles. Cependant, il y a plusieurs catégories de code qui ne seront plus utilisables sur x86, en particulier toutes celles qui touchent directement le hardware : les spécificités du processeur et de la carte mère. Hormis les instructions altivec, ces bouts de code sont rares. En effet, le génie logiciel d'aujourd'hui permet, grâce à de très nombreuses librairies, de programmer proprement et efficacement à un niveau suffisamment élevé pour ne pas dépendre directement du matériel. Les rares programmes qui nécessiteront une refonte (partielle ou globale) sont ceux qui ont été particulièrement optimisés pour notre plateforme en ayant été codés en bas niveau. Je pense en particulier à distributed.net, Photoshop, les iApps et consorts qui utilisent tous altivec, ou de l'assembleur PowerPC. Il en est de même pour les jeux. De ce côté les développeurs ont du travail... mais ils bénéficieront sans aucun doute des expériences de leurs collègues de bureau, qui travaillent sur les versions Windows x86 de ces logiciels. Il ne faut pas croire que ce sera facile ! Mais ce sera sans commune mesure avec le passage d'OS9 à OSX, beaucoup plus facile et beaucoup moins fatigant que les premiers portages de jeux optimisés pour les plateformes Intel vers PowerPC, la partie bas niveau n'étant plus à refaire. Comme les jeux demandent en général des configurations plutôt performantes, la développement de ceux-ci pour PowerPC ne se fera probablement plus. Ce ne sera sans doute pas le cas des logiciels courants, qui pouront être compilés pour les deux plateformes grâce au support des Fat Binaries qu'apporte Mac OS X.
Entre nous, ça permettra peut-être aussi d'avoir une version de Photoshop utilisant CoreImage ;), donc une vraie bombe pour ceux qui ont eu la chance d'utiliser cette technologie.
Il faut aussi ajouter que les méthodes de développement restent les mêmes, comme les librairies. Seul quelques rares développeurs rattachés aux sources touchant le hardware devront se mettre à niveau. Il va sans dire qu'une grande partie des développeurs baissant aujourd'hui les bras sont défaitistes. Et d'ailleurs pourquoi se plaindraient-ils d'avoir du travail? ;) D'une part, les règles du développement logiciel font de la portabilité une des qualités majeure de l'application. Apple vient de le montrer en faisant tourner leur OS sur une plateforme tierce. Les programmes ne suivant pas un minimum de règles dans ce sens sont rares. Le langage C et C++ n'ont d'ailleurs pas été normés pour rien. D'autre part les outils fournis par Apple sont impressionnants pour cette migration. xCode en est la clé. Il permet de détecter les portions de code incompatibles et de compiler directement pour PowerPC et x86. Il est important que les développeurs utilisent dès aujourd'hui ces outils.
Mais qu'est ce que cela va changer pour nous, utilisateurs ?
Au premier abord, rien ! On aura toujours notre boîte, avec un clavier, une souris, un écran et Mac OS X en arrière-plan. Il est probable que certains programmes mettront du temps à passer le cap, mais ce ne seront sûrement pas les mieux développés, et probablement pas les plus intéressants. En outre, le marché du soft sur OS X est un marché assez dynamique. Quand on regarde les perles que nous sortent les groupes comme Omni, Apple et du côté du logiciel libre, je crois qu'il ne faut pas trop nous en inquiéter. Bien au contraire! On va peut-être voir disparaitre quelques monstruosités (restons optimistes :) ).
L'utilisation de la compilation "mixte" PowerPC et Intel permettra de garder une compatibilité descendante sur les logiciels nouvellement développés, pour autant que ceux-ci ne soient pas de trop bas niveau. Il n'y a donc pas de raison pour les utilisateurs courants de ne pas acheter un Mac aujourd'hui.
Je vais refroidir tout de suite les ardeurs de ceux qui croient que le MacTel pourra faire tourner Windows nativement, ou que le nombre de périphériques et de cartes vidéos va augmenter : la ROM restera sans aucun doute propriétaire, c'est une obligation pour la survie d'Apple. N'espérez pas non plus faire tourner Mac OS X sur du non MacTel ! L'OS sera profondément blindé contre ce genre de transplantation. Même si cela devait réussir, je doute que cela aille bien loin. OpenFirmware quant à lui disparait (Apple n'a pas précisé au profit de quoi) et nous passerons sur du Little Endian. Rassurons-nous, une grande partie des périphériques ne nécessiteront qu'une recompilation des drivers avec de très légères retouches du code (du moins pour les drivers en "user-level" comme les imprimantes, les scanners, etc). Pour ce qui est des cartes SCSI, ATA, tout ce qui possède un logiciel interne c'est encore un peu tôt pour le dire, leur driver interne (firmware) étant écrit en FORTH pour l'OpenFirmware de nos PowerPC. Je ne vais pas m'avancer plus sans savoir ce qu'Apple a prévu à ce niveau.
Ceux qui croient qu'un éventuel émulateur Windows permettrait d'atteindre de bonnes performances sur un MacTel, plus particulièrement pour les jeux, se trompent. Ce serait oublier entre autre DirectX, technologie propriétaire de Microsoft "in-émulable" ; et il ne faut pas croire qu'Apple va leur laisser créer un émulateur capable de prendre en charge complètement la carte graphique, de manière à utiliser DirectX "from scratch".
Il ne faut pas trop croire non plus à un surcoût de développement à cause de cette migration, donc à un surcoût pour le consommateur. En effet, les logiciels bas niveau qui doivent être modifiés profiteront des sources de leurs cousins sur Wintel. Ceux qui ne nécessitent pas de modifications ne demandent qu'une recompilation. Il faut peut-être émettre une réserve sur les programmes écrits en Carbon qui sont encore assez courants particulièrement dans les grosses suites. Mais je suis sûr qu'Apple restera à l'écoute des demandes et fera tout son possible pour les satisfaire. Il est fortement probable que les coûts d'achat des Mac baissent avec cette transition, donc quelque part on s'y retrouvera ;).
De plus, Apple nous fournit Rosetta, un émulateur PowerPC pour x86 qui semble nettement plus avancé et performant que ce qu'est Classic aujourd'hui, du moins sur le Pentium 4 3,6GHz monoprocesseur de la démonstration, alors d'ici là sur du multi-core...
Du côté des professionnels, en particulier des indépendants, le taux de renouvellement des machines approche les 3 ou 4 ans. Pour les entreprises, tout dépend de la politique, mais en général c'est un peu plus court. Le taux de renouvellement des logiciels professionnels (coûteux) se situe également dans ces eaux-là, bien que certaines entreprises possèdent des leasing faisant office de licenses (donc possibilité de renouveler chaque année les programmes). Le choix d'acheter un Mac sur PowerPC aujourd'hui reste un choix tout à fait valable pour eux. Le support sera fourni par Apple pour quelques années encore (plus de 3 ans après la sortie des premiers MacTel sans doute). Ces machines ne seront pas moins dépassées après la sortie des MacTel qu'aujourd'hui le sont nos macs avec ceux de demain. De plus et pour la première fois, les clients d'Apple savent enfin où va la firme de Cupertino ! C'est ce que leur réclamaient beaucoup d'entre nous qui utilisons notre machine comme outil de travail. Ce type de clientèle choisira au cas par cas le comportement à adopter.
Les grands consomateurs de Xserve ont un taux de renouvellement des machines beaucoup plus long que les professionnels : un cluster se garde au moins cinq ans, si ce n'est plus. Il est dévoué à des tâches spécifiques qu'une migration générale ne devrait pas influencer. Par ailleurs, la gamme Xserve est promise à un bon avenir, Mac OS X étant le système idéal pour grignoter les parts de marché Windows et surtout Linux. Pour cela il faudra qu'Apple fasse encore un effort sur les performances interne du kernel et de la couche BSD.
En tant que Mac Users restons optimistes! Nous n'avons rien à perdre, mais tout à gagner. Cette migration est beaucoup moins risquée que celle qu'on a vécue entre le 68k et le PowerPC, de par le hardware qui nous attend, et la robustesse de Mac OS X.
Le premier amour de mon père était un 68k, le mien un PowerPC.... et celui de nos enfants ? Qu'importe ! Si nous sommes en train de lire ces lignes c'est que notre passion c'est Apple et Mac OS !
L'abandon du PowerPC m'a clairement mis un coup, mais ce n'est que de l'émotion, pas ma raison. Comme on dit par ici "Une bonne cuite et ça repart !!". Pour la première fois, j'ai un aperçu de ce que sera mon Mac dans 2 ou 3 ans.